samedi 29 octobre 2011

« Je baissai un peu la tête, comme les autres femmes. Sans même savoir pourquoi. »

Chercher le féminisme en Afrique de l'Ouest n'est pas tâche facile. Surtout dans le monde francophone. Une recherche sur google ne permet vraiment pas de se faire une idée. Dix recherches sur google non plus. Où se cachent les féministes ouest-africaines ? Elles sont peu sur Internet, c'est vrai. Elles sont sur le terrain. Parfois elles se cachent, car il n'est pas facile de se dire féministe. Et souvent, elles écrivent.

L'écriture fictionnelle est un outil de subversion incroyable, un moyen de dire, de faire dire à ses héroïnes, des choses qui passeraient moins bien avec l'essai ou la parole publique. Leurs héroïnes disent la souffrance d'être femmes, étriquées dans des existences dont elles dominent rarement le cours, encadrées par les normes sociales. Elles disent les violences sexuelles. Elles disent l'exclusion de celles qui sortent des chemins tout tracés. Elles disent les combats de celles qui remettent en cause l'ordre établi.


« Ici, il n'y aura pas de soutiens-gorge en dentelle, de bas résille, de petites culottes en soie à prix excessif, de parfums de roses ou des gardénias, et encore moins ces approches rituelles de la femme fatale, empruntés aux films ou à la télévision. » Femme nue, femme noire, Calixte Beyala
Ecriture féminine, écriture féministe ?
La plupart d'entre elles refusent cette étiquette. Aminata Sow Fall avait eu une réponse restée célèbre à ce sujet lors d'un interview : « Féministe ? Moi ? ». Citons l'héroïne de la Nigériane Sefi Atta dans Le Meilleur reste à venir :
« Etais-je féministe ? Dans mon pays, il suffisait qu'une femme éternue pour que quelqu'un la traite de féministe.  Je n'avais jamais cherché ce mot dans un dictionnaire mais existait-il un mot pour décrire ce que je ressentais de plus en plus ? […] Quand on s'en prenait à une mouche et qu'elle s'élevait dans les airs, est-ce qu'elle devenait mouchiste ? »
 Des écrivaines à leur héroïnes, un seul mot d'ordre : la liberté, le refus d'un carcan qui nous maintient dans un rôle de femme écrit à l'avance. Leur féminisme à elles est existentialisme. Laissez-nous vivre librement, comme nous le souhaitons, nous disent-elles ! Et cette liberté s'exprime justement dans le roman, outil pour se dire, se définir, et enfin, exister.

« Tuer le vide du silence », voilà pourquoi les femmes prennent la parole, nous dit l'une des héroïnes de Calixte Beyala dans Tu t'appelleras Tanga. Prendre la parole, c'est prendre un pouvoir, exprimer sa liberté. Et finalement peut importe que cette prise de pouvoir s'appelle féminisme ou autre chose.

« J'écris parce que j'écris, je ne veux pas d'étiquette » nous dit Elisabeth Moundo. Et pour laiser le dernier mot à Calixte Beyala : « Que celui qui se sent mal à l'aise passe sa route... »

NDLR : le titre de cet article est un extrait du roman de Sefi Atta, Le Meilleur reste à venir

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